Publié le 23 août 2021
A l’occasion de son colloque « Nouveau consommateur, nouvelles supply chains » en avril dernier, Bretagne Supply Chain recevait Emmanuel Caron, Business Development Manager pour la branche Ambient Food Logistics de Dachser France. L’occasion d’évoquer avec lui l’année si particulière que nous avons traversé et sa vision des enjeux à venir pour répondre aux attentes du nouveau consommateur.
Bretagne Supply Chain : Quels changements avez-vous observé ces derniers mois en termes de consommation des Français et des européens ? Qu’est-ce que cela a impliqué chez Dachser ?
Emmanuel Caron : Nous avons traversé une crise qui a été à la fois un révélateur et un accélérateur, aussi bien pour la partie industrielle que pour la partie supply chain.
Chez Dachser, nous sommes un pure-player BtoB mais nous avons vu cette sollicitation arriver vers le BtoC, et donc forcément une mutation de la demande du consommateur. D’où cet impact sur la supply chain. Des sujets extrêmement importants émergent sur l’agroalimentaire, en lien avec la traçabilité et l’intégrité, dans un contexte de pression sanitaire extrêmement fort. Dans notre activité internationale, il y a eu aussi la combinaison avec un autre événement européen compliqué pour les industriels et la supply-chain : le Brexit ! Un phénomène qui est venu s’ajouter à toutes les difficultés dans l’organisation de la supply chain.
BSC : Vous observez aussi un besoin de mise à disposition des produits de plus en plus rapide avec parfois des DLC très courte…
EC : C’est tout l’enjeu des nouveaux produits qui arrivent. C’est ce que j’appelle la convergence des exigences entre les produits secs et les produits frais. C’est aussi le sujet du » nouveau consommateur », qui s’habitue à avoir une disponibilité de produit de plus en plus rapide au travers d’une supply chain BtoC. Le consommateur fait de plus en plus ses courses à proximité. La mise à disposition dans des points de vente plus proche impacte donc aujourd’hui la supply chain. Il y a des schémas d’organisation qui sont nouveaux et qui apparaissent de plus en plus techniques.
BSC : Est-ce que le flux hyper tendu à encore de l’avenir dans la supply-chain alimentaire ? Ou est-ce que les enjeux RSE remettront bientôt sérieusement en cause ce paradigme ?
E.C. : Je pense qu’il faut distinguer la typologie de produits dans l’agroalimentaire. Nous serons en phase de rapidité de flux par définition sur des produits frais (cueillis le matin, produits dans la journée et mis en distribution). Sur ce sujet, il sera compliqué de se séparer d’un réseau rapide. Mais il y a une vraie question de fond, et qui n’est pas qu’une question de transport. En effet, c’est une question « RSE », voire un peu philosophique entre les industriels et les distributeurs. Est-ce qu’aujourd’hui, sur des produits qui ont des dates de consommation longues, devons-nous nous caler sur une logistique de produit frais ? C’est une vraie question aujourd’hui, à la fois globale et de société.
BSC : La « techfood » arrive. Ce sont de nouveaux produits qu’il faut transporter…
E.C. : Absolument. L’agroalimentaire, c’est 98% de PME et de TPE très innovatrices en termes de produits. Depuis quelques années maintenant, il y a un vrai phénomène d’accélération. Depuis un an et demi, la techfood a un impact sur la supply chain. Il y a l’arrivée de nouveaux aliments technologiquement évolués avec beaucoup de recherches. Nous le voyons au quotidien, notamment en Bretagne, avec des produits à base d’algues pour l’industrie agroalimentaire ou la cosmétique. Il y a aussi de nombreux sujets en termes d’innovation autour de la protéine.
Protéines 2.0
Des produits à base de protéines végétales vont compenser les produits à bases de protéines animales. De très grandes entreprises ont déjà passé le cap de mise à disposition de ces produits. La protéine animale « 2.0 », à partir des insectes, est aujourd’hui tournée vers l’industrie de l’alimentation animale. Très rapidement elle sera à destination de la nourriture humaine. Nous verrons apparaître de nouvelles contraintes logistiques avec des cahiers des charges logistiques qui seront de plus en plus exigeants. Quand nous analysons les cahiers des charges de nos clients, nous observons une convergence des exigences de l’agroalimentaire des produits secs vers celles de la température dirigée. Par conséquent, cela posera – et cela pose déjà – de nouvelles questions en termes d’approches de la supply chain. Tout cela, dans un contexte d’accélération des flux. C’est un gros sujet dans nos organisations.
BSC : Quel est la vision de la transition énergétique pour Dachser ?
E.C. : Chez Dachser, nous sommes inscrits dans un programme de recherches sur l’hydrogène en Allemagne avec différents partenaires. Aujourd’hui, le bon modèle en matière d’énergie n’est pas encore trouvé. L’hydrogène est pour nous un axe de recherche. Nous avons déjà développé des solutions que l’on connait aujourd’hui comme le bioGNV. Nous avons aujourd’hui une trentaine de véhicules qui roulent en France avec l’objectif d’atteindre 50 véhicules d’ici 2023.